Tous les soirs à vingt-deux heures ils arrivent en les traînant par l'oreille, la peau du dos, le chandail, tout ce que vous voulez, mais pas par la main. Qu'il neige, qu'il vente, qu'il gèle, ils viennent. Ceux qu'ils emmènent n'ont aucun répit, ni celui d'un beau soir d'été, ni celui d'un lendemain de fête trop arrosée. A l'image du temps, leur passage est irréversible. Parfois, je me cache afin d'observer leur sinistre déambulation. L'air résigné de leurs victimes, le ciel qui tourne le dos, l'air qui s'empuantit. Est-ce que la culpabilité a une odeur ? Lentement, ils les conduisent au grand cube et un à un, ils les poussent à l'intérieur. Pas de cris, pas d'agitation, la résignation ici s'impose. La porte en métal est fermée derrière le dernier condamné. Et les bourreaux s'en vont sans hâte, ils reviendront demain. Quand je pose mon oreille sur les parois du cube, je n'entends rien d'autre que le vent, l'eau qui coule goutte à goutte. Un lieu de passage n'est pas habité. Ceux que j'ai vus, innombrables, sont déjà loin. Et je ne peux rien y faire.
Comme tout monde, le terril a ses tréfonds. Et si je connais la porte de cet enfer, je ne m'y attarde pas. La vie ailleurs attend.
En avant.
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