mardi 3 février 2015

Le terril (26)


Certaines grottes ornées étaient ouvertes au public depuis des décennies, mais les hommes, fronceurs de sourcils obtus, n'y voyaient rien. Et puis ce sont des enfants qui ont levé le doigt et obligé les sceptiques. La fille d'un marquis, des adolescents chiquant et portant bérets se sont faufilés le long des parois et ont inventé nos origines. Avant qu'à leur tour, leur regard s'obscurcisse. Mais d'autres voyants naissent et naîtront encore et toujours. Je fais un pari : les naufragés du regard que nous sommes seront toujours contredits.
Certains jours, j'entraîne là-haut ces petits découvreurs. Ils courent, trébuchent, me marchent sur les pieds, se pendent à mon sac aussi et me font ployer sous leur poids. Si je ressens parfois de la lassitude face à ces versions imprévisibles d'eux-mêmes, je fais confiance à leur don. Je les écoute, je prends des notes. De leurs yeux avides, ils m'indiquent d'autres formes, d'autres ancrages, d'autres propensions. Les lisières du monde ne sont désormais plus des horizons.
En avant.

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