jeudi 7 octobre 2010

Le condamné à mort

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Alors que je m'interrogeais sur les raisons des nombreuses rééditions à venir d'ouvrages de Jean Genet (il aurait eu 100 ans cette année ?), je suis tombé ici sur une interprétation magnifique d'un de ses plus célèbres textes : Le condamné à mort (1945). En 1952, André Almuro, compositeur electroacoustique et collaborateur de Pierre Schaeffer à ses heures, a écrit une pièce de musique concrète pour accompagner la lecture du long poème par le chanteur et acteur français Marcel Mouloudji. La beauté et le mystère du texte sont superbement servis par une lecture toute en tension et par une musique sombre et pleine de détails fascinants qui évoque parfaitement l'ambiance sombre et claustrophobe de la prison. Ici, un extrait (texte ci-dessous) qui a été popularisé notamment (dans un autre registre) par Etienne Daho ou par Hélène Martin. Pas d'excuses à ceux qui n'écouteraient pas ce disque précieux et merci à Continuo.
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"Sur mon cou sans armure et sans haine, mon cou
Que ma main plus légère et grave qu'une veuve
Effleure sous mon col, sans que ton cœur s'émeuve
Laisse tes dents poser leur sourire de loup.

Ô viens mon beau soleil, ô viens ma nuit d'Espagne
Arrive dans mes yeux qui seront morts demain.
Arrive, ouvre ma porte, apporte-moi ta main
Mène-moi loin d'ici battre notre campagne.

Le ciel peut s'éveiller, les étoiles fleurir
Ni les fleurs soupirer, et des prés l'herbe noire
Accueillir la rosée où le matin va boire
Le clocher peut sonner : moi seul je vais mourir.

Ô viens mon ciel de rose, ô ma corbeille blonde !
Visite dans sa nuit ton condamné à mort.
Arrache-toi la chair, tue, escalade, mords
Mais viens ! Pose ta joue contre ma tête ronde.

Nous n'avions pas fini de nous parler d'amour.
Nous n'avions pas fini de fumer nos gitanes.
On peut se demander pourquoi les Cours condamnent
Un assassin si beau qu'il fait pâlir le jour.

Amour, viens sur ma bouche ! Amour, ouvre tes portes !
Traverse les couloirs, descends, marche léger
Vole dans l'escalier plus souple qu'un berger
Plus soutenu par l'air qu'un vol de feuilles mortes.

Ô traverse les murs, s'il le faut marche au bord
Des toits, des océans, couvre-toi de lumière
Use de la menace, use de la prière
Mais viens, ô ma frégate, une heure avant ma mort."

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2 commentaires:

Elise a dit…

Il n'y a peut-être aucune autre raison dans toutes ces rééditions et ces événements autour de Jean Genet, pour le centenaire de sa naissance, que l'occasion trouvée pour lui rendre hommage...

Quoiqu'il en soit, pour les amoureux et/ou curieux de Jean Genet, une conférence "Portrait de Jean Genet" aura lieu le jeudi 2 décembre 2010 au conservatoire Léo Delibes de Clichy. Elle sera conduite par Agnès Vannouvong, chercheuse et auteure spécialiste de Genet.

A aller voir aussi, pour toutes les actus autour de l'auteur :
Société des Amis et Lecteurs de Genet (S.A.L.G) http://jeangenet.pbworks.com/

Elise a dit…

Information intéressante également : la mise en scène de "Haute Surveillance" par Layla Metssitane de la Cie du Théâtre des Hommes.

Il s'agit d'une pièce bien peu mise en scène...
Une représentation est prévue jeudi 27 février 2011 à 20h30 au théâtre Rutebeuf de Clichy (toujours dans le cadre du centenaire de la naissance de l'auteur).

Et pour la petite info-promo qui fait son effet : pour une place achetée, une place est offerte... alors ce serait dommage d'y aller seul(e) ! (bien qu'il y ait moyen de trouver d'autres solos devant le théâtre pour partager ^^)