Fuzzy Dunlop me fait remarquer que sur ce blog, ça manque de Brel portant fourrure. Le manque est désormais comblé. Tu peux ranger les armes.
jeudi 31 janvier 2013
mercredi 30 janvier 2013
Paradigme indiciaire (6)
"C'est à la mémoire des sans nom que se consacre la construction de l'histoire."
(extrait issu des matériaux préparatoires à Sur le concept d’histoire de Walter Benjamin, 1940)
"La douleur de la remémoration (...) relève du "travail engagé" du souvenir, de cette pente irrépressible qui conduit l'esprit, et avec lui l'écriture, et avec lui la lecture, à poursuivre les chimères d'un monde disparu ou "depuis longtemps abandonné"."
(La transcription de l'histoire. Essai sur le roman européen de la fin du XXe siècle d'Emmanuel Bouju, 2006)
Notre intérêt du moment pour la microhistoire, le paradigme indiciaire et les relations entre histoire et littérature s'est vu récompensé ces deux derniers jours par la lecture d'un livre important : Histoire des grands-parents que je n'ai pas eus. Une enquête d'Ivan Jablonka (Seuil, 2012).
L'auteur est historien et décide il y a quelques années de reconstituer l'histoire de ses grands-parents paternels, Matès et Idesa Jablonka. Juifs polonais, communistes, émigrés sans-papiers en France, puis déportés et disparus à Auschwitz, tous deux incarnent une de ces générations de "sans nom" "pulvérisées par l'Histoire". Au départ de sa recherche, Ivan Jablonka ne dispose que de quelques lettres, photographies et souvenirs familiaux, mais à force d'obstination et grâce à la méthode heuristique rigoureuse à laquelle il s'astreint (le nombre d'archives qu'il a dû consulter force l'admiration), il parvient à retrouver - en partie - le monde disparu de ses grands-parents.
Ce qu'il obtient en termes d’Histoire est déjà passionnant. Mais l'intérêt de cette enquête réside également dans son agencement et son écriture, sobre, courageuse et sous-tendue par une réflexion sur l’histoire. Jablonka fait en effet entrer le lecteur dans son atelier, communique ses doutes et ses interrogations. Pour quiconque serait intéressé par sa démarche, on trouvera ici un discours remarquable de l'auteur, prononcé lors de la réception du prix du Sénat.
Dans notre bibliothèque mentale, on range cet ouvrage aux côtés du Monde retrouvé de Louis-François Pinagot de Corbin, du Fromage et les vers de Ginzburg, de la Survivance des lucioles de Didi-Huberman, de l'Espèce humaine d'Antelme ou encore de W ou le souvenir d'enfance de Perec. C'est peu dire qu'il nous a impressionné...
Ci-dessous, on trouvera un extrait de l'introduction pp. 10-11) :
" Le petit garçon a grandi et n'a pas grandi. J'ai trente-huit ans, je suis père de famille. Ai-je encore la force de porter ces êtres dont je suis la projection dans le temps ? Ne puis-je nourrir leur vie de la mienne, plutôt que de mourir sans cesse de leur mort ? Mais Matès et Idesa Jablonka n'ont laissé derrière eux que quelques orphelins, quelques lettres, un passeport. Folie que de vouloir retracer la vie d'inconnus à partir de rien ! Vivants, ils étaient déjà invisibles ; et l'histoire les a pulvérisés. Ces poussières du siècle ne reposent pas dans quelque urne du temple familial ; elles sont en suspension dans l'air, elles voyagent au gré des vents, s'humectent à l'écume des vagues, paillettent les toits de la ville, piquent notre œil et repartent sous un avatar quelconque, pétale, comète ou libellule, tout ce qui est léger et fugace. Ces anonymes, ce ne sont pas les miens, ce sont les nôtres. Il est donc urgent, avant l'effacement définitif, de retrouver les traces, les empreintes de vie qu'ils ont laissées, preuves involontaires de leur passage en ce monde.
Conçue à la fois comme une biographie familiale, une œuvre de justice et un prolongement de mon travail d’historien, ma recherche commence. Elle est un acte d'engendrement, le contraire d'une enquête criminelle, et elle me conduit tout naturellement sur le lieu de leur naissance."
Et plus loin, alors que l'auteur vient de faire une découverte importante dans un centre d'archives (pp. 163-164) :
"Je crois que je suis devenu historien pour un jour faire cette découverte. La distinction entre nos histoires de famille et ce qu'on voudrait appeler l'Histoire, avec sa pompeuse majuscule, n'a aucun sens. C'est rigoureusement la même chose. Il n'y a pas, d'un côté, les grands de ce monde, avec leurs sceptres ou leurs interventions télévisées, et, de l'autre, le ressac de la vie quotidienne, les colères et les espoirs sans lendemain, les larmes anonymes, les inconnus dont le nom rouille au bas d'un monument aux morts ou dans quelque cimetière de campagne. Il n'y a qu'une seule liberté, une seule finitude, une seule tragédie qui fait du passé notre plus grande richesse et la vasque de poison dans laquelle notre cœur baigne. Faire de l’histoire, c'est prêter l'oreille à la palpitation du silence, c'est tenter de substituer à l'angoisse, intense au point de se suffire à elle-même, le respect triste et doux qu'inspire l'humaine condition. Voilà mon travail ; et, en caressant cette archive de tribunal, en suivant des yeux les lignes tracées par la plume du greffier, je ressens un soulagement indicible."
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dimanche 27 janvier 2013
Retour (11)
L'émission La planète bleue s'est intéressée au livre. Ci-dessous, un extrait du texte de présentation et ici le podcast.
"Cette semaine, "La Planète Bleue" va vous présenter un livre absolument
formidable, "Field recording, l'usage sonore du monde", un bouquin
étonnant et rare sur l'enregistrement de terrain. A 100'000
années-lumière de la daube marketée de près qu'on nous fourgue en
essayant de nous faire croire que c'est de la musique, ce livre recense
une centaine d'albums exceptionnels, enregistrés dans la rue, dans la
forêt ou sous la mer. Tout au long du 20e siècle, des passionnés ont arpenté la planète
entière afin de capter des curiosités sonores, des richesses inouïes,
pour des raisons scientifiques, patrimoniales ou esthétiques. Les
microphones sont leurs outils, l'écoute est leur approche, la captation
leur grammaire. En sortant du studio, ces chercheurs prennent le risque
de se confronter à l'imprévisible, à l'incontrôlable, au fragile, à l'intouchable. Ce livre est lui-même un bijou, nous allons le feuilleter ensemble…"
Sur son blog, Joseph Ghosn a également présenté le bouquin et a posté une compilation de morceaux :
"En plus d’être aux commandes du blog Les Maitres Fous, Alexandre Galand
a sorti récemment un livre déjà classique, ne serait-ce qu’à cause de
son statut si singulier, qui traite des disques de field recordings –
enregistrements de terrain, qui reproduisent les bruits du monde.
Alexandre en a fait un guide dense et labyrinthique, car de cette
pratique qui semble réservée aux explorateurs scientifiques, s’est
développée une multitude de possibilités sonores, musicales, concrètes,
au-delà du geste documentaire pur. Son livre, donc, Field Recording,
l’usage sonore du monde en 100 albums (Le Mot Et Le Reste, qui est par
ailleurs l’éditeur de deux de mes livres), est un précieux guide de
découvertes, une cartographie au sein d’un amoncellement
d’enregistrements cherchant déjà eux-mêmes à établir une carte sonore du
monde."
Ci-dessus, Béla Bartók collectant des chants en 1907 à Zobordarazs, près de Drazovce en Slovaquie.
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vendredi 25 janvier 2013
Some of these days
Un certain concert de décembre 2010 plus loin à l'ouest. Une expérience, enfin. Depuis, il se passe peu de jours sans que je pense aux Japonais de Maher Shalal Hash Baz, pour le meilleur... C'est donc un peu un rêve qui s'accomplit puisqu'ils joueront ce samedi 16 février à Liège (!), ce qui est déjà incroyable, mais en plus ils viennent avec Arlt (!!) et Le Ton Mité. Ils seront donc 13 (!) sur scène. Spasmes.
On a déjà pas mal rigolé en lisant la notice wikipedia du groupe, dont voici quelques extraits :
Maher Shalal Hash Baz is the artistic alter ego of Tori Kudo, a Japanese naivist composer and musician. The name is taken from Maher-shalal-hash-baz in the Book of Isaiah
verses 8:1 and 8:3, and translates roughly as "Hurrying to the spoil,
he has made haste to the plunder." Maher-Shalal-Hash-Baz is also
mentioned in the Book of Mormon in verses 2 Ne 18:1 and 18:3.
Tori Kudo has been cagy about details of his life before MSHB. He was once a member of a shadowy, revolutionary political party in Japan, although he has dissociated himself from politics since joining the Jehovah's Witnesses. He also works as a ceramicist.
Tori Kudo has resisted defining the sound of his band, although in an interview with Tim Footman in Careless Talk Costs Lives
magazine (August 2002) he declared "I am punk." There are also elements
of folk, psychedelia and free jazz; the band's tendency to ask members
of the audience to join in adds a sense of danger in live performance.
Perhaps the best description comes from his own sleevenotes to From a Summer to Another Summer: "Error in performance dominates MSHB cassette which is like our imperfect life."
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mardi 22 janvier 2013
Vers les cimes (26)
"Mais, le printemps venu, nous prenions notre part des beuveries étranges qui sont d'usage en ces campagnes. Nous nous enveloppions dans des manteaux de fous bariolés, faits de lambeaux et chatoyant ainsi qu'un plumage, et posions sur notre visage les rigides masques en forme de bec. Puis, bondissant comme en une danse bouffonne, les bras battant comme des ailes, nous descendions dans les bourgs, où sur les vieux marchés le grand arbre des Fous était dressé. Là se déroulait à la lueur des torches la procession des masques ; les hommes y étaient costumés en oiseaux, et les femmes se déguisaient dans les costumes de fête des temps anciens. Elles nous criaient des railleries sur une note élevée, leur voix mimant la musique des horloges, et nous leur répondions en poussant le cri aigu des oiseaux.
Déjà, dans les cabarets, dans les caves des tonneliers, nous parvenaient comme des appels les marches des corps de métier sous le signe de l'oiseau, minces flûtes à la voix perçante, et c'étaient les chardonnerets, vibrantes guitares, c'étaient les chats-huants, ronflantes contrebasses des coqs de bruyère, et ces orgues de barbarie criards dont la corporation de la huppe accompagne ses couplets infâmes. Frère Othon et moi, nous allions rejoindre les Pics noirs, où l'on rythme la marche sur des cuveaux avec des cuillers à pot, et nous tenions conseil en un tribunal bouffon. Pour boire, il fallait être habile, car on aspirait le vin avec une paille passée par les trous de nos becs. Quand des vapeurs menaçaient notre cerveau, quelque course dans les jardins et les fossés de l'enceinte nous rendait la fraîcheur ; nous allions aussi nous mêler aux danses, ou bien, sous la tonnelle d'une auberge, nous ôtions le masque et mangions, en compagnie de quelque amour d'une heure, les escargots à la mode burgonde préparés dans les creux nombreux de l'immense poêle.
Partout et jusqu'au point du jour, retentissait durant ces nuits l'appel aigu, le cri d'oiseau, dans les sombres ruelles et sur le bord de la vaste Marina, dans les bosquets de châtaigniers, dans les vergers, dans les gondoles parées de lampions qui circulaient sur les sombres eaux du lac, et même entre les grands cyprès des cimetières. Et toujours, pareil à son écho, l'on entendait le cri effarouché qui, fugitif, lui répondait. Les femmes de ce pays sont belles, et débordantes de cette force généreuse que le vieux Boutefeu appelle la vertu donatrice."
Ernst Jünger, Sur les falaises de marbre 1939 (traduit par Henri Thomas, Gallimard, L'imaginaire, pp. 14-16).
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jeudi 17 janvier 2013
Paradigme indiciaire (5)
"Un jour, se promenant
auprès d'un petit bois, il vit accourir à lui un eunuque de la
reine, suivi de plusieurs officiers qui paraissaient dans la plus
grande inquiétude, et qui couraient çà et là comme des hommes
égarés qui cherchent ce qu'ils ont perdu de plus précieux. « Jeune
homme, lui dit le premier eunuque, n'avez-vous point vu le chien de
la reine ? » Zadig répondit modestement : « C'est
une chienne, et non pas un chien. » Vous avez raison, reprit le
premier eunuque. — C'est une épagneule très petite, ajouta
Zadig ; elle a fait depuis peu des chiens ; elle boite du
pied gauche de devant, et elle a les oreilles très longues. — Vous
l'avez donc vue ? dit le premier eunuque tout essoufflé. Non,
répondit Zadig, je ne l'ai jamais vue, et je n'ai jamais su si la
reine avait une chienne.
Précisément
dans le même temps, par une bizarrerie ordinaire de la fortune, le
plus beau cheval de l'écurie du roi s'était échappé des mains
d'un palefrenier dans les plaines de Babylone. Le grand veneur et
tous les autres officiers couraient après lui avec autant
d'inquiétude que le premier eunuque après la chienne. Le grand
veneur s'adressa à Zadig, et lui demanda s'il n'avait point vu
passer le cheval du roi. « C'est, répondit Zadig, le cheval
qui galope le mieux ; il a cinq pieds de haut, le sabot fort
petit ; il porte une queue de trois pieds et demi de long ;
les bossettes de son mors sont d'or à vingt-trois carats ; ses
fers sont d'argent à onze deniers. — Quel chemin a-t-il pris ?
où est-il ? demanda le grand veneur. — Je ne l'ai point vu,
répondit Zadig, et je n'en ai jamais entendu parler. »
Le grand veneur et le premier eunuque ne doutèrent pas
que Zadig n'eût volé le cheval du roi et la chienne de la reine ;
ils le firent conduire devant l'assemblée du grand Desterham, qui le
condamna au knout, et à passer le reste de ses jours en Sibérie. A
peine le jugement fût-il rendu qu'on retrouva le cheval et la
chienne. Les juges furent dans la douloureuse nécessité de réformer
leur arrêt ; mais ils condamnèrent Zadig à payer quatre cents
onces d'or, pour avoir dit qu'il n'avait point vu ce qu'il avait vu.
Il fallut d'abord payer cette amende ; après quoi il fut permis
à Zadig de plaider sa cause au conseil du grand Desterham ; il
parla en ces termes :
« Étoiles
de justice, abîmes de science, miroirs de vérité qui avez la
pesanteur du plomb, la dureté du fer, l'éclat du diamant, et
beaucoup d'affinité avec l'or, puisqu'il m'est permis de parler
devant cette auguste assemblée, je vous jure par Orosmade, que je n
ai jamais vu la chienne respectable de la reine, ni le cheval sacré
du roi des rois. Voici ce qui m'est arrivé : Je me promenais
vers le petit bois où j'ai rencontré depuis le vénérable eunuque
et le très illustre grand veneur. J'ai vu sur le sable les traces
d'un animal, et j'ai jugé aisément que c'étaient celles d'un petit
chien. Des sillons légers et longs imprimés sur de petites
éminences de sable entre les traces des pattes m'ont fait connaître
que c'était une chienne dont les mamelles étaient pendantes et
qu'ainsi elle avait fait des petits il y a peu de jours. D'autres
traces en un sens différent, qui paraissaient toujours avoir rasé
la surface du sable à côté des pattes de devant, m'ont appris
qu'elle avait les oreilles ; très longues ; et comme j'ai
remarqué que le sable était toujours moins creusé par une patte
que par les trois autres, j'ai compris que la chienne de notre
auguste reine était un peu boiteuse, si je l'ose dire. »
Extrait du chapitre 3 de Zadig ou la destinée de Voltaire (1747).
mardi 15 janvier 2013
Paradigme indiciaire (4)
Passage de l'Opéra, Paris, 1909
"La trace est l’apparition d’une proximité, quelque lointain que puisse
être ce qui l’a laissée. L’aura est l’apparition d’un lointain, quelque
proche que puisse être ce qui l’évoque. Avec la trace, nous nous
emparons de la chose ; avec l’aura, c’est elle qui se rend maîtresse de
nous."
Walter Benjamin, Paris, capitale du xixe siècle. Le livre des passages, trad. par Jean Lacoste, 3e édition, Paris (M 16a, 4).
"Au phénomène de la trace doit avant tout être rattaché le flâneur que
Benjamin est, il est vrai, le premier à avoir identifié comme une figure
spécifique du xixe siècle. Alors que le promeneur, son précurseur du xviiie siècle
(M 13a, 3), découvrait dans la nature sauvage un paysage esthétique, le
flâneur découvre un monde qui lui y est opposé, un monde étranger à la
nature : « ce dernier voit la ville se scinder en deux pôles
dialectiques. Elle s’ouvre à lui comme paysage et elle l’enferme comme
chambre (Stube) »
(M 1, 4). La masse des grandes villes est l’élément vital du flâneur.
Elle est pour lui tout à la fois labyrinthe et asile, enivrant élixir de
vie et incomparable champ d’observation sur lequel son regard
physiognomonique fait ses preuves dans l’art de « déchiffrer sur les
visages la profession, l’origine et le caractère »
(M 6, 6), enregistrant les traces, perçant ce que la vie publique tient
caché. Le flâneur préfigure ainsi le détective (M 13a, 2). C’est
l’expérience moderne de l’anonymat au sein de la masse des grandes
villes en perpétuelle croissance (attestée depuis 1798)
que cette figure incarne. En littérature, elle se traduit par
l’avènement du roman policier dont le contenu social tient, à l’origine,
à « l’effacement des traces de l’individu dans la foule de la grande
ville ». "
"Ce qui, aux yeux de Baudelaire, différenciait le flâneur du simple badaud était, entre autres, le fait qu’en tant qu’homme de la foule,
il pouvait tout aussi bien rester dans une distance souveraine à
l’égard des foules des grandes villes (« L’observateur est un prince
qui jouit partout de son incognito ») ou y plonger comme dans un
« immense réservoir d’électricité » en « amoureux de la vie
universelle », tout en mettant en mots la connaissance, sinon la
conscience qu’il avait d’elle (« On peut aussi le comparer, lui, à un
miroir aussi immense que cette foule ; à un kaléidoscope doué de
conscience »).
À un moment au moins, Benjamin reconnaît que le flâneur dans la foule
peut sans doute avoir vu au travers de l’illusion sociale. « L’oisiveté
du flâneur est une protestation contre la division du travail » (M 5, 8)
Extraits de Hans Robert Jauss, « Trace et aura. Remarques à propos du Livre des passages de Walter Benjamin », Trivium, 10–2012 (texte paru en ligne ici)
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lundi 14 janvier 2013
Retour (10)
1. Interview et recension dans le numéro 13 d'Obsküre Magazine. Une interview bonus est par ailleurs lisible ici. Ce n'est évidemment pas notre pomme qu'on voit sur le papier, mais bien celle de notre ami Fuzzy Dunlop, un lendemain de veille difficile, sur les hauteurs du site des Eparges...
2. Quelques extraits du livre ont été lus dans le cadre de l'hebdo radio Gacha Empega sur Radio Campus Besançon. On peut écouter ça ici.
2. Quelques extraits du livre ont été lus dans le cadre de l'hebdo radio Gacha Empega sur Radio Campus Besançon. On peut écouter ça ici.
3. Enfin, on remercie notre camarade Xavier et sa collègue Maria pour leur sympathique accueil de ce samedi. Invité pour intervenir au sujet du field recording (et de ses relations avec le cinéma) auprès d'étudiants de bac 2 de l'Ecole de recherche graphique à Bruxelles, j'ai passé une bien bonne après-midi.
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dimanche 13 janvier 2013
Paradigme indiciaire (3)
John Berger (pour le texte) et Jean Mohr (pour les photographies) ont composé avec Un métier idéal. Histoire d'un médecin de campagne (première édition en anglais en 1967) un portrait, grave et profond, du médecin anglais John Sassall. Où l'on peut songer en passant à la notion décisive de "symptôme"...
"C'est une femme d'environ trente-sept ans. Il flotte encore autour d'elle un petit air d'écolière : l'une parmi les filles les moins intelligentes, physiquement plus développée que les autres, mais que la maturité physique a déjà rendue lente et maternelle plutôt que vive et séduisante. Ce sont les dernières traces qui flottent encore autour d'elle. D'ici deux ans, elles auront disparu. Elle s'occupe de sa mère, et c'est en général pour la mère et non pour la fille que le médecin se rend au cottage.
Il a vu la fille pour la première fois dix ans auparavant. Elle avait un rhume, elle toussait et se sentait faible. Sa radio des poumons était normale. Il avait l'impression qu'elle désirait parler de quelque chose. Elle ne le regardait jamais en face mais ne cessait de lui jeter de petits coups d'oeil anxieux comme si elle pouvait ainsi le rapprocher d'elle. Il l'interrogea mais ne parvint pas à gagner sa confiance.
Quelques mois plus tard, elle souffrit d'insomnie et d'asthme. Tous les tests d'allergie se révélèrent négatifs. L'asthme empira. Quand il la voyait, elle lui souriait à travers sa maladie. Elle avait les yeux ronds d'un lapin. Elle craignait tout ce qui se trouvait à l'extérieur de la cage de sa maladie. Lorsqu'on l'approchait de trop près, ses yeux se plissaient comme la peau autour du nez d'un lapin. Son visage était pourtant presque dépourvu de rides. Il avait la conviction que son état résultait d'une tension émotionnelle extrême. Toutes deux, sa mère et elle, affirmaient cependant qu'elle n'avait pas de soucis.
Deux ans après, il découvrit l'explication par hasard. Il avait été appelé au milieu de la nuit pour un accouchement. Trois femmes du voisinage étaient là. Pendant qu'il attendait, il but une tasse de thé dans la cuisine en leur compagnie. L'une d'elles travaillait dans une grande laiterie industrielle de la ville la plus proche desservie par le chemin de fer. La fille asthmatique y avait également travaillé dans le temps. Il s'avéra que le directeur - un membre de l'Armée du Salut - avait eu une liaison avec elle. Bien sûr, il avait promis de l'épouser. Puis, saisi de remords et de scupules religieux, il l'avait abandonnée. S'était-il agi d'une véritable liaison, ou l'avait-il simplement, un soir, conduite par la main hors de la crèmerie jusqu'à son bureau avec ses fauteuils en cuir ?
Le médecin interrogea de nouveau la mère. Sa fille lui avait-elle paru heureuse quand elle travaillait à la laiterie ? Oui, parfaitement heureuse. Il posa la même question à la fille. Elle sourit dans sa cage et fit oui de la tête. Puis il lui demanda de but en blanc si le directeur ne lui avait pas fait des avances. Elle se figea - comme un animal qui se rend compte qu'il lui est impossible de fuir. Ses mains s'immobilisèrent. Sa tête demeura tournée sur le côté. Sa respiration devint inaudible. Elle ne répondit jamais.
Son asthme persista et provoqua une insuffisance respiratoire. Elle survit grâce aux stéroïdes. Son visage est lunaire. Ses yeux sont placides. Par contre, ses sourcils, ses paupières et la peau tirée sur ses pommettes tressaillent à chaque mouvement et chaque bruit qui pourraient annoncer quelque chose d'inattendu. Elle s'occupe de sa mère, quitte très rarement le cottage. Quand elle rencontre le médecin, elle lui sourit comme elle sourirait sans doute au soldat de l'Armée du Salut.
Avant, l'eau était profonde. Puis est venu le torrent de Dieu et de l'homme. Et ensuite les hauts-fonds, clairs mais toujours remués, toujours irrités par leur propre manque de profondeur comme par une allergie. Il y a un coude de la rivière qui rappelle souvent son échec au docteur."
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lundi 7 janvier 2013
L'usage sonore du monde (19)
Walter Ruttmann Melodie der Welt 1929 (un extrait ci-dessus et le film entier ci-après)
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vendredi 4 janvier 2013
Retour (9)
J'ai répondu à quelques questions pour la revue Sciences et Avenir. Merci à Arnaud Devillard. Pour lire l'interview, aller voir là ou ci-dessous. Mes réponses ont été raccourcies par souci de concision, mais ce n'est pas grave.
SHAMA. En 1889, le phonographe Edison existe depuis
une douzaine d’années. C’est avec cet appareil que le tout premier
enregistrement connu du chant d’un oiseau est réalisé par... un enfant
de huit ans ! L’Allemand Ludwig Koch, futur preneur de son spécialiste
de l’enregistrement de chants d’oiseaux et de sons urbains, avait en
effet l’habitude de traîner son phonographe dans la ménagerie familiale.
Il capta ainsi le chant d’un shama à croupion blanc, inaugurant de ce
qui allait devenir une véritable discipline : l’audio-naturalisme.
Alexandre Galand, docteur en histoire, art et archéologie, détaille cette pratique méconnue dans un livre, Field recording.
Enregistrements de la faune (biophonie), bruit de la pluie, du vent,
des volcans, des vagues (géophonie), sans oublier les captations de
musiques du monde entier, dans les îles du Pacifique, chez les Inuits,
au Rajasthan ou dans le Mississippi, l’exercice se situe à la croisée de
la démarche artistique et scientifique.
Sciences et Avenir: A la lecture de votre livre, les disques
de chants d’oiseaux semblent avoir d’abord une vocation artistique.
Ont-ils aussi une visée scientifique ?
Alexandre Galand: L’audio-naturalisme s'est principalement développé
en dehors du cadre de la recherche académique. La dimension artistique
de cette pratique paraît évidente : on n’enregistre et on n’édite pas de
la même manière un chant d’oiseau, le brame du cerf ou le roulement des
vagues. Cela dit, l’audio-naturalisme relève de plusieurs domaines
scientifiques : la biologie, l'acoustique ou la géographie, et
l’audio-naturaliste est souvent un bon naturaliste avant tout.
Les disques engendrés peuvent donc être écoutés pour le loisir,
l'évasion, mais aussi participer d'une prise de conscience des problèmes
écologiques de notre temps. Sans oublier la portée éducative; je pense
aux guides conçus pour apprendre à reconnaître les chants et cris
d’oiseaux.
SetA: De tels enregistrements ont-ils suscité de réelles découvertes ?
AG: C’est en tout cas un terrain d’études très fertiles. Il suffit pour s’en rendre compte de consulter la revue Bioacoustics.
Il faut aussi mentionner l’existence de la zoomusicologie. Cette
discipline, contestée, étudie les aspects musicaux des productions
acoustiques animales : les structures, les répétitions ou encore la
durée des intervalles des cris et chants animaux.
Pour les domaines qui m’intéressent, c’est-à-dire ceux du disque et
des interpénétrations entre art et science, je retiens le cas du
compositeur californien David Dunn. Pour son disque The Sound of Light in Trees,
il a conçu un système d’enregistrement de très petite taille afin de
révéler le paysage sonore de l’intérieur d’un pin à pignons, un arbre du
nord du Nouveau-Mexique. Dunn souligne alors un problème écologique
majeur : la prolifération des scolytes. Ces coléoptères xylophages
consomment habituellement le bois des arbres les plus faibles et
participent ainsi à la régénération des forêts. Or, avec le changement
climatique entraînant des hivers plus chauds, ces insectes ont tendance à
se multiplier et à décimer des forêts entières. Dunn a collaboré avec
des agents forestiers afin de localiser les populations d’insectes sur
le point de s’activer, en se fondant sur leur production sonore. Ce
travail a permis de prendre des mesures pour freiner l’expansion des
colonisateurs.
SetA: Et dans le domaine des musiques traditionnelles ?
AG: Là, l’origine de la captation de musiques sur le terrain (field recording,
en anglais, ndlr), est directement liée au domaine scientifique.
Jusqu’aux années 1950 et 1960, ce sont presque uniquement des
ethnomusicologues qui enregistrent. La pratique n’est pas encore
disponible pour le tout venant, notamment en raison du coût des
appareils que seules des institutions officielles peuvent prendre en
charge.
SetA: Que recherche l'ethnomusicologue ?
AG: Il serait difficile de le résumer en quelques phrases, mais
disons que l’ethnomusicologie s’intéresse notamment aux origines de la
musique (qui d’après certains serait apparue avant le langage).
Qu’est-ce qui, parmi les différentes productions sonores humaines, peut
être considéré comme de la musique, et par qui ? Existe-t-il des
universaux, c’est-à-dire des traits communs à des groupes humains
parfois très éloignés géographiquement, dans la pratique, la manière de
penser et les structures de la musique ?
Avec des gens comme Alan Lomax, Hugh Tracey ou Deben Bhattacharya
apparaissent ensuite des collecteurs de musiques non plus seulement
intéressés par leur portée scientifique, mais aussi par leur valeur
patrimoniale et leur capacité à susciter l’émotion. Transmettre ces
musiques vers un plus large public est d’une importance capitale.
SetA: Côté technique, on est passé du phonographe au nagra et
aujourd’hui aux enregistreurs numériques. Cette évolution vers plus de
maniabilité a-t-elle fait évoluer le « field recording », tant dans sa
pratique que dans ses contenus ?
AG: Jusqu’au milieu du 20e siècle, la durée d’un
enregistrement au phonographe est très limitée. Avec l’invention du
magnétophone, mais aussi avec les disques 33-tours de longue durée, on a
pu donner une meilleure idée de ces sons et musiques et de leur
contexte d’exécution.
Il reste que l’usage du matériel le plus sophistiqué n’est jamais une
garantie de réussite artistique. Dans l’enregistrement de terrain,
l’écoute est une étape primordiale. Savoir réagir de manière sensible,
parfois intuitive, à l’irruption de phénomènes sonores intéressants est
tout aussi important. La technique ne favorise en rien ces aptitudes.
SetA: Vous expliquez qu’il existe de moins en moins d’espaces
vierges, que les captations de sons de la nature sont souvent
parasitées par la présence humaine. Faut-il la gommer ? D’autant que le
numérique facilite les choses..
AG: La possibilité de manipuler des sons n’a pas attendu le numérique
pour se développer. Echantillonner des disques, découper la bande
magnétique, accélérer ou décélérer, ajouter des effets : tous ces
procédés existent depuis des décennies.
Dans le cadre de l’audio-naturalisme, l’opérateur doit au minimum
restituer des enregistrements respectant la cohérence écologique
(cohabitation des espèces). Pour le reste, gommer la présence humaine
est impossible, l’enregistrement lui-même est dû à la présence et à
l’action d’un audio-naturaliste ! Ensuite, en occultant les bruits
d’origine anthropique (rumeur urbaine, moteurs d’avions), ne risque-t-on
pas de transmettre un fantasme de nature plutôt que sa réalité, même si
celle-ci est décevante ? Ce choix revient à l’opérateur.
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jeudi 3 janvier 2013
Le silence des bêtes
Le silence des bêtes. La philosophie à l'épreuve de l'animalité, la somme d'Elisabeth de Fontenay initialement parue en 1998 est enfin rééditée en poche ce jour. On en trouve une recension ici. On peut également lire là un entretien avec la philosophe paru en 2000 dans la revue Vacarme. Et ci-dessous, la présentation de l'éditeur.
"L'Antiquité fut en quelque sorte un âge d'or pour les bêtes. Car si les
hommes offraient des animaux en sacrifice à Dieu, aux dieux, ils
s'accordaient sur leur statut d'êtres animés et avaient pour elles de la
considération. Certes, bien des questions demeuraient ouvertes, et les
philosophes de ce temps ne manquèrent pas de s'entredéchirer en tentant
d'y répondre. Les animaux pensent-ils ? Sont-ils doués de raison ?
Ont-ils la même sensibilité que nous ? Faut-il s'interdire de les manger
? Mais pourquoi donc restent-ils silencieux ? Depuis que Dieu s'est fait
homme, que le Christ s'est offert en sacrifice tel un agneau,
c'est-à-dire depuis l'ère chrétienne, la condition de l'animal a
radicalement changé. Désormais les philosophes se préoccupent surtout de
verrouiller le propre de l'homme et de ressasser les traits qui le
différencient des autres vivants, lesquels sont considérés comme des
êtres négligeables : tenus pour des machines (Descartes) et à l'occasion
comparés à des pommes de terre (Kant). Des hommes d'esprit et de coeur
font bien sûr exception, au XVIIIe siècle surtout. A leur suite,
Michelet dénoncera prophétiquement l'injustice faite aux animaux et
annoncera que c'est compromettre la démocratie que de les persécuter. Au
XXe siècle, une certaine littérature vient renforcer de nouveaux
courants philosophiques pour rappeler que la manière dont nous regardons
les bêtes n'est pas sans rapport avec la façon dont sont traités
quelques-uns d'entre nous, ceux que l'on déshumanise par le racisme,
ceux qui, du fait de l'infirmité, de la maladie, de la vieillesse, du
trouble mental, ne sont pas conformes à l'idéal dominant de la
conscience de soi. Ce livre expose avec clarté la façon dont les
diverses traditions philosophiques occidentales, des Présocratiques à
Derrida, ont abordé l'énigme de l'animalité, révélant par là même le
regard que chacune d'elle porte sur l'humanité. C'est pourquoi on peut
le lire aussi comme une autre histoire de la philosophie."
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Le sang des bêtes
"Un homme qui fend son bœuf pendant les douze coups de midi."
Georges Franju Le sang des bêtes 1949
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mercredi 2 janvier 2013
Retour (8)
Le livre a été présenté dans la nouvelle revue Zone Grise (premier texte ci-dessous) par Clément C. et dans Télérama (second texte) par François Gorin. Il a par ailleurs été inclus dans la page des ressources du World Forum for Acoustic Ecology et dans le top 2012 de notre camarade Young Girls Records.
"L'art du micro
Alan Lamb est chercheur en
neurophysiologie. En 1976, il découvre en périphérie rurale de Perth,
Australie, plus d’un kilomètre de fils téléphoniques abandonnés, soient
douze poteaux et six fils dégainés. Agités par le vent, ces fils
produisent des sons, un chant de la rencontre entre une production
humaine abandonnée et une énergie naturelle, autonome. Un baptême,
« Faraway Wind Organ », des micros pour des heures d’enregistrement, les
éléments étant sensibles à des évènements aussi subtils que le trot des
pattes d’une araignée, et parmi d’autres résultats, un disque brut, Archival Recordings sorti en 1995, aux deux longues pistes d’un drone né de reliques industrielles, hypnotique, dense, vivant.
Ce disque, avec quatre-vingt-dix-neuf autres, est présenté par Alexandre Galand dans Field Recording, L’Usage sonore du monde en cent albums,
immersion dans l’univers des enregistrements dits de terrain. Une
anthologie donc, mais aussi une introduction élégante, des interviews
d’acteurs majeurs et qui permettent de saisir les trois principales
démarches regroupées sous cet alias unique, audio-naturalisme, collecte
ethno-musicologique, composition, et leurs fertiles interpénétrations.
Le style ne pèche jamais tant la phrase est alerte, vive, concise. Le
néophyte pris du minimum vital de curiosité désespérera vite de trouver
le temps de localiser puis d’écouter l’intégralité des disques choisis,
tant Galand sait transmettre la joie qu’il a éprouvée à la découverte de
chacun d’entre eux. Un micro, un enregistreur, un disque, et le monde
est à nouveau là, devant soi, prêt à l’usage, prêt à la sauvegarde, pour
qui veut s’en donner la peine." (Zone Grise)
"Capter le blues du Mississippi, les flûtes du Rajasthan ou les
chants des oiseaux... une pratique décrite dans deux ouvrages
passionnants.
Qu'est-ce qu'un « field recording » ? Deux livres, passionnants et complémentaires, cernent la question. Dans le premier, The land where the blues began, traduit près de vingt ans après sa parution américaine, Alan Lomax raconte par le détail comment, dès les années 1930, avec son père John, il a enregistré dans le delta du Mississippi des musiciens noirs aussi démunis que talentueux. Certains de ces bluesmen s'appelaient Son House, Leadbelly, Big Bill Broonzy, Muddy Waters. Il s'agissait de garder la trace, même fugace, d'un foisonnement musical alors non reconnu, à la fois primitif et sophistiqué. Ce travail de défrichage a donné quantité de recueils et d'anthologies, qui forment une encyclopédie vivante du folk et du blues, et continuent d'exercer leur influence aujourd'hui. Sous-titré L'Usage sonore du monde en 100 albums, en hommage à l'écrivain voyageur Nicolas Bouvier, l'ouvrage d'Alexandre Galand, Field Recording, élargit la notion d'« enregistrement de terrain ». Sa recension part d'une vision ethnographique pour dériver jusqu'à la musique concrète et aux « captations d'environnement sonore ». On y croise donc des chants d'oiseaux, des flûtes du Rajasthan... et les Prison Songs collectées par Alan Lomax." (Télérama)
Qu'est-ce qu'un « field recording » ? Deux livres, passionnants et complémentaires, cernent la question. Dans le premier, The land where the blues began, traduit près de vingt ans après sa parution américaine, Alan Lomax raconte par le détail comment, dès les années 1930, avec son père John, il a enregistré dans le delta du Mississippi des musiciens noirs aussi démunis que talentueux. Certains de ces bluesmen s'appelaient Son House, Leadbelly, Big Bill Broonzy, Muddy Waters. Il s'agissait de garder la trace, même fugace, d'un foisonnement musical alors non reconnu, à la fois primitif et sophistiqué. Ce travail de défrichage a donné quantité de recueils et d'anthologies, qui forment une encyclopédie vivante du folk et du blues, et continuent d'exercer leur influence aujourd'hui. Sous-titré L'Usage sonore du monde en 100 albums, en hommage à l'écrivain voyageur Nicolas Bouvier, l'ouvrage d'Alexandre Galand, Field Recording, élargit la notion d'« enregistrement de terrain ». Sa recension part d'une vision ethnographique pour dériver jusqu'à la musique concrète et aux « captations d'environnement sonore ». On y croise donc des chants d'oiseaux, des flûtes du Rajasthan... et les Prison Songs collectées par Alan Lomax." (Télérama)
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mardi 1 janvier 2013
Du papier pour 2012
Toujours des mondes qui s'effondrent et malgré tout "organiser le pessimisme".
André Hardellet, Le seuil du jardin
Georges Didi-Huberman, Survivance des lucioles
Claude Simon, L'acacia
Carlo Ginzburg, Le fromage et les vers
Georg Büchner, Lenz
Laurie Lee, Rosie ou le goût du cidre
Colin Thubron, En Sibérie
Edward O. Wilson, Biophilie
Vincent Pélissier, Toucher terre
Pierre Nora (dir.), Les lieux de mémoire
Jean-Christophe Bailly, Le dépaysement
Georges Simenon, Lettre à mon juge
Pierre Bergounioux, Carnet de notes 2000-2010
Marshall Sahlins, La nature humaine : une illusion occidentale
Walter Benjamin, Images de pensée
Cat. expo. Les maîtres du désordre
Jean Malaurie, Les derniers rois de Thulé
John d'Agata, Yucca Mountain
Alexandre Vialatte, Chroniques de la Montagne
Antoine de Baecque et Philippe Chevallier (dir.), Dictionnaire de la pensée du cinéma
Jean-Yves Jouannais, L'usage des ruines
Julien Gracq, Un balcon en forêt
Charles Fréger, Wilder Mann ou la figure du sauvage
Philippe Descola, Par-delà nature et culture
Les carnets du paysage, A la croisée des mondes et Bout du monde
Jean Echenoz, 14
Patrick Boucheron, L'entretemps. Conversations sur l'histoire
Frédéric Pajak, Manifeste incertain 1
Pierre Patrolin, La traversée de la France à la nage
Gonçalo M. Tavares, Un voyage en Inde. Mélancolie contemporaine (un itinéraire)
Romain Bertrand, L'histoire à parts égales. Récits d'une rencontre, Orient-Occident (XVIe-XVIIe siècle)
David Simon, Baltimore
...
Paradigme indiciaire (2)
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