lundi 6 janvier 2014

La danse des possédés (80)



En écoutant ce morceau ce matin dans le train, j'ai pris la main de mon voisin sans crier gare. Je croyais qu'il allait s'énerver, mais il a tendu son autre main à la personne qui était face à lui. De main en main, nous avons bientôt formé une immense chaîne humaine. En quelques minutes, nous étions plus de cent, debout, à faire vivre la plus belle farandole qu'il m'ait été donné de voir. Ensemble, nous hurlions "La chenille !" "La chenille !" "La chenille !"... Et j'en ai presque fait saigner mes cordes vocales. On dit le navetteur gris, apathique et esclave de son quotidien, mais il suffit d'une étincelle pour qu'il se transforme en débaucheur d'attaché-case, en percuteur ivre de portes coulissantes, en apprenti malfaiteur de wagons-boîtes. "Rien de plus fragile que la faculté humaine d'admettre la réalité, d'accepter sans réserves l'impérieuse prérogative du réel." Mais si le réel "insiste et tient absolument à être perçu, il pourra toujours aller se faire voir ailleurs."

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