En ces temps de réjouissances et de classements de fin d'année, il est bon de ne pas oublier les vieux grincheux :
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"Qu'y a-t-il aujourd'hui de plus artificiel que notre musique qui imite le gazouillis de multiples oiseaux en utilisant un si grand nombre de voix ? Que dirait Emérèpes, cet éphore de Lacédémone qui coupa à la hache deux des neuf cordes de la lyre du musicien Phrynis en lui disant : "Ne corromps pas la musique !" Que dirait-il aujourd'hui s'il entendait qu'on reproduit dans les églises avec un seul et même orgue les trompettes, les cors, les trompes, les flûtes ouvertes, les flûtes à la sonorité plus grave, les flûtes au son rauque, le tonnerre, les voix humaines et les chants des oiseaux ? Notre musique est à l'image de nos vêtements, comme à celle de notre nourriture ou à celle de notre architecture. On ne retrouve nulle part la simplicité d'autrefois, le nombre de raffinements artificiels s'accroît de jour en jour. Ainsi, aussi longtemps que les mœurs des hommes n'avaient pas été corrompues, leur langage était également resté plus sobre : ce qu'il serait facile de découvrir par comparaison entre les écrivains anciens et les auteurs plus récents, comme Hippocrate avec Galien, Socrate avec Chrysippe. Aujourd'hui toute sagesse a dégénéré en un bavardage plus que sophistique, et c'est la raison pour laquelle elle a perdu le nom de sagesse, qu'elle en est venue à être méprisée, et qu'elle n'est encore à peu près honorée que par des esprits qui n'ont rien de brillant."
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Erasme, La langue (Lingua - 1525), édité dans Opera Omnia Desiderii Erasmi IV-1 A, pp. 52-53, 880-892.
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"Qu'y a-t-il aujourd'hui de plus artificiel que notre musique qui imite le gazouillis de multiples oiseaux en utilisant un si grand nombre de voix ? Que dirait Emérèpes, cet éphore de Lacédémone qui coupa à la hache deux des neuf cordes de la lyre du musicien Phrynis en lui disant : "Ne corromps pas la musique !" Que dirait-il aujourd'hui s'il entendait qu'on reproduit dans les églises avec un seul et même orgue les trompettes, les cors, les trompes, les flûtes ouvertes, les flûtes à la sonorité plus grave, les flûtes au son rauque, le tonnerre, les voix humaines et les chants des oiseaux ? Notre musique est à l'image de nos vêtements, comme à celle de notre nourriture ou à celle de notre architecture. On ne retrouve nulle part la simplicité d'autrefois, le nombre de raffinements artificiels s'accroît de jour en jour. Ainsi, aussi longtemps que les mœurs des hommes n'avaient pas été corrompues, leur langage était également resté plus sobre : ce qu'il serait facile de découvrir par comparaison entre les écrivains anciens et les auteurs plus récents, comme Hippocrate avec Galien, Socrate avec Chrysippe. Aujourd'hui toute sagesse a dégénéré en un bavardage plus que sophistique, et c'est la raison pour laquelle elle a perdu le nom de sagesse, qu'elle en est venue à être méprisée, et qu'elle n'est encore à peu près honorée que par des esprits qui n'ont rien de brillant."
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Erasme, La langue (Lingua - 1525), édité dans Opera Omnia Desiderii Erasmi IV-1 A, pp. 52-53, 880-892.
2 commentaires:
Tout fout le camp...
C'est drôle de voir comment le "c'était mieux avant" ne date pas d'hier.
J'étais justement en train de préparer un papier dans le style mais dont la source est nettement moins vieille, elle date des années 60.
Joyeuses fêtes !
Excellentes fêtes à toi !
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