Quelques exemples des "cartes et lignes d'erre" réalisées à l’initiative de Fernand Deligny. Avec quelques explications ci-dessous, issues du livre consacré à ce sujet et publié aux éditions L'Arachnéen. Et on va voir ou revoir les films de Deligny et ses comparses, dont le magnifique Le moindre geste, publiés dans la collection Le geste cinématographique.
"En 1968, Fernand Deligny fonde un réseau de prise en charge
d’enfants autistes dans les Cévennes, à Monoblet. Quelques années plus
tard (1975-1976), il consacre trois numéros de la revue Recherches,
fondée par Félix Guattari, à cette expérience qu’il mène en marge des
institutions éducatives et psychiatriques. Deligny n’est pas psychiatre.
Il parle d’ailleurs plus volontiers d’enfants mutiques qu’autistes. À
une époque où la prise en charge de l’autisme infantile est encore mal
assurée, il propose un milieu de vie organisé en aires de séjour dans
lesquelles les enfants vivent le coutumier auprès d’adultes non diplômés
(ouvriers, paysans, étudiants). À ces éducateurs qui n’en sont pas – il
les appelle les présences proches -, il propose de transcrire les
déplacements et les gestes des enfants. Dans chacune des aires de séjour
– situées à une quinzaine de kilomètres les unes des autres – et durant
dix ans, au jour le jour (le soir ou le lendemain, parfois plusieurs
jours après), les adultes tracent des cartes sur lesquelles ils
reportent leurs propres trajets puis, sur des calques, les lignes d’erre
des enfants. « Pour rien, pour voir, pour n’avoir pas à en parler, des
enfants – là, pour éluder nom et prénom, déjouer les artifices du IL dès
que l’autre est parlé. » Ces cartes ne servent ni à comprendre ni à
interpréter des stéréotypies ; mais à « voir » ce qu’on ne voit pas à
l’œil nu, les coïncidences ou chevêtres (lignes d’erre qui se recoupent
en un point précis, signalant qu’un repère ou du commun se sont
instaurés), les améliorations à apporter à l’aménagement de l’espace, le
rôle des objets d’usage dans les initiatives des enfants, leur degré de
participation à telle tâche coutumière au fil des jours, l’effet sur
eux du geste pour rien d’un adulte (un signe, un repère supplémentaire),
etc."
5 commentaires:
C'est drôle : en lisant quelques lignes je ne sais plus où l'autre jour, j'ai pensé que c'était étonnant que tu n'aies pas déjà plongé dans Deligny.
Ses études me semblent recouper des questions qui nourrissent ce blog densément.
A présent que c'est chose faite, eh bien, "point de hasard", héhé
Par ailleurs : fort bien, jusque là cette série "Des milliards de pères"!
Merci !
Oui, de Deligny, j'ai vu Le moindre geste il y a quelques temps grâce à son édition par Le geste cinématographique...
Mais il me faudra encore explorer l’œuvre du bonhomme, notamment avec 'Graine de crapule', il me plaît bien ce titre.
Extrait : "Quand tu auras passé trente ans de ta vie à mettre au point de subtiles méthodes psycho-pédiatriques, médico-pédagogiques, psychanalo-pédotechniques, à la veille de la retraite, tu prendras une bonne charge de dynamite et tu iras discrètement faire sauter quelques pâtés de maisons dans un quartier de taudis.
Et en une seconde, tu auras fait plus de travail qu’en trente ans.
Si tu es pour si peu dégoûté du métier, ne t’embarque pas sur notre bateau car notre carburant est l’échec quotidien, nos voiles se gonflent de ricanements et nous travaillons fort à ramener au port de tous petits harengs alors que nous partions pêcher la baleine."
et le merveilleux
La Moindre des choses de Nicolas Philibert
https://www.youtube.com/watch?v=CKJp9JLqTkY
Bien sûr, bien vu !
Le moindre n'est décidément pas le moins...
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